L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail vient de publier un avis relatif à l'utilisation des procédés membranaires permettant de filtrer les eaux de bassin ou les eaux de lavage des filtres des piscines publiques pour assurer la sécurité sanitaire des baigneurs. Les travaux menés ont permis de comparer les éléments de performance, les conditions d'usage, les limitations spécifiques des différentes familles de procédés membranaires, en particulier vis-à-vis de leur tenue au chlore. Cette expertise peut également constituer un outil d'aide à la décision pour les exploitants des piscines désireux d'utiliser ce type de procédés. Si les procédés membranaires s'avèrent particulièrement efficaces pour filtrer les eaux des piscines publiques, l'Agence rappelle que la qualité de l'eau passe avant tout par l'application des mesures d'hygiène corporelle par les baigneurs.

L'eau des bassins de piscines publiques peut être contaminée par :

  • Des matières particulaires (comme les cheveux ou les squames - petits bouts de peau qui se détachent de l'épiderme - qui peuvent constituer un support pour les micro-organismes pathogènes),
  • Des matières organiques dissoutes (urine, sueur, etc.), apportées majoritairement par les baigneurs.  

Ainsi, pour assurer la sécurité sanitaire des baigneurs, l'eau doit être filtrée, désinfectée et désinfectante en permanence. La filière de traitement des eaux mise en place à cet effet doit également limiter au maximum les sous-produits de désinfection (SPD), dont le nombre, la nature et la concentration varient fortement selon les conditions d'exploitation et d'usage, voire selon l'origine de l'eau alimentant les bassins. En effet, leur présence peut représenter un risque sanitaire pour les usagers et les exploitants.
L'Anses souligne que le moyen le plus économique et le plus efficace pour accroître la qualité de l'eau des bassins est de limiter au maximum sa contamination, ce qui passe en premier lieu par l'application des mesures d'hygiène corporelle par les baigneurs. Elle rappelle l'importance, pour les établissements, de faire connaître ces règles et, pour les utilisateurs, de les respecter. Les quantités de produits de désinfection utilisés et les coûts d'installation et d'exploitation des filières de traitement seront ainsi minimisés.

Comparaison des différents procédés membranaires de filtration des eaux de bassin des piscines publiques

Il existe plusieurs techniques de filtration des eaux de bassin : filtre à diatomite, filtre à billes de verre, filtre à sable ou procédés membranaires.
La filtration sur sable est le procédé de filtration de l'eau des piscines publiques le plus utilisé actuellement en France. Employée seule, cette technique ne permet pas toujours de respecter les exigences règlementaires relatives à la qualité de l'eau. Pour les atteindre, les exploitants augmentent le taux de renouvellement de l'eau des bassins.
La filtration membranaire est un procédé de séparation physique  utilisant une membrane à la fois perméable et sélective. Cette membrane, selon ses caractéristiques intrinsèques et son mode d'utilisation, constitue une barrière permettant le transfert ou la rétention de certains composés. Quatre types de membranes existent en fonction de la taille moyenne de leurs pores et de leurs seuils de coupure (c'est-à-dire la taille des molécules pouvant passer à travers leurs pores) :   

  • l'osmose inverse (OI),
  • la nanofiltration (NF),
  • l'ultrafiltration (UF)
  • la microfiltration (MF).

Quelle que soit la technologie employée, les procédés membranaires s'avèrent particulièrement efficaces pour produire une eau clarifiée d'excellente qualité. En revanche, la rétention des micro-organismes dépendra du type de membrane de filtration utilisé. Ce procédé reste néanmoins plus efficace que les rétentions réalisées à l'aide de filtres à sable. Enfin, l'élimination des contaminants chimiques et des SPD eux-mêmes est très dépendante du type de membrane.

Le moyen le plus économique et le plus efficace pour accroître la qualité de l'eau des bassins est de limiter au maximum sa contamination, ce qui passe en premier lieu par l'application des mesures d'hygiène corporelle par les baigneurs. 


Grâce à leurs caractéristiques physico-chimiques (résistance aux températures, au pH, etc.), les membranes de NF, UF et MF peuvent remplacer les différents filtres (à sable, à diatomite, à billes de verre) actuellement utilisés pour la « clarification » des eaux de bassin. Néanmoins, avec l'objectif d'éliminer également les contaminants chimiques et les SPD, l'Agence recommande d'avoir recours à la mise en place d'un procédé de traitement hybride, pouvant intégrer notamment du charbon actif. Ces traitements complémentaires permettent de surcroît de préserver les caractéristiques des membranes.
Si le procédé de filtration membranaire est installé dans une piscine dont l'eau est désinfectée par un couplage ozone/chlore, les experts recommandent d'installer le procédé de filtration membranaire après l'étape de « désozonation » obligatoire avant que l'eau n'atteigne le bassin, afin de préserver les caractéristiques de la membrane.

Recommandations de l'Agence pour la filtration des eaux de lavage de filtre

Les membranes de MF ou d'UF présentent les caractéristiques techniques les plus adaptées pour la filtration des eaux de lavage de filtre. Afin d'optimiser la filtration de ce type d'eau, l'Anses recommande que l'eau de lavage des filtres soit rejetée dans le réseau des eaux usées pendant 1 à 2 minutes en début de cycle de lavage, de manière à s'assurer que l'eau la plus chargée en matières organiques soit correctement évacuée. L'eau doit ensuite être pré-filtrée à l'aide d'un filtre de seuil de coupure de 200 micromètres avant d'être filtrée par le système membranaire. L'eau est alors :

  • soit conservée dans une bâche dite « bâche d'eau propre » en vue de sa réutilisation pour le lavage des filtres ;
  • soit chlorée puis envoyée dans le bac tampon en tant qu'eau d'appoint.

L'Agence rappelle que l'ensemble des procédés membranaires ne peuvent pas être considérés comme des procédés de désinfection. A ce titre, il n'est pas envisageable de réduire les concentrations de désinfectants dans les bassins en dessous de la valeur minimale fixée dans la réglementation (chlore libre actif compris entre 0,4 et 1,4 milligramme par litre en l'absence de stabilisant, chlore libre disponible supérieur à 2 milligrammes par litre en cas d'utilisation de chlore stabilisé).

Vers une attestation de conformité sanitaire

Les modules membranaires utilisés pour la filtration des eaux destinées à la consommation humaine (EDCH) doivent disposer, avant leur mise sur le marché, d'une Attestation de Conformité Sanitaire (ACS)*.
L'ACS permet de vérifier que les produits et matériaux ne sont pas susceptibles d'altérer les caractéristiques de l'eau par relargage des constituants des modules membranaires. Pour ces mêmes raisons, l'Agence propose que les procédés membranaires utilisés pour filtrer l'eau des piscines disposent également d'une ACS adaptée aux eaux de piscine chaudes et chlorées.

* Arrêté du 22 juin 2012 modifié relatif aux conditions de mise sur le marché et de mise en oeuvre des modules de filtration membranaire utilisés pour le traitement d'EDCH pris en application de l'article R-1321-50 (I et II) du CSP.